Masisi : quand l’assistance humanitaire se heurte aux réalités du terrain

Territoire de Masisi (Nord-Kivu), 2 juillet 2025 — Alors que les distributions alimentaires du PAM (Programme Alimentaire Mondial) et de World Vision se poursuivent dans les zones de regroupement des déplacés, plusieurs bénéficiaires expriment des inquiétudes liées à l’organisation sur les sites : files d’attente prolongées, communication insuffisante et processus de plaintes peu efficaces.
🕰️ Des attentes éprouvantes, une logistique sous pression
Les files d’attente aux points de distribution, notamment à Kirotshe, Matanda, Kitchange, Katoyi, Kibabi ou encore Nyange, peuvent s’étendre sur plusieurs heures. Beaucoup arrivent dès 5h du matin pour espérer être servis dans la journée.
« Nous comprenons que les besoins sont très importants et que les partenaires font de leur mieux. Mais parfois, nous passons toute la journée sur place sans être appelés », rapporte Safi, mère déplacée originaire de Kalengera.
La forte affluence, combinée à un calendrier de distribution parfois mal compris, contribue à ces retards. Des efforts sont en cours pour renforcer la signalisation, les listes d’attente et les appels par haut-parleurs, mais la pression reste forte.
⚖️ Préoccupations autour de l’équité et de la transparence
Si la majorité des bénéficiaires saluent le soutien alimentaire reçu — farine de maïs, légumineuses, huile et sel — certains évoquent des cas isolés de favoritisme ou de confusion dans les listes de bénéficiaires. Il arrive que des noms soient absents ou que des ménages soient signalés comme déjà servis.
« J’étais inscrite sur la liste de Kibabi, mais arrivée sur place, on m’a dit que ma ration avait été remise à quelqu’un d’autre », témoigne une déplacée qui a tenté de déposer une plainte via le canal communautaire.
Ces situations, bien que minoritaires, alimentent parfois des tensions sur les sites. Des animateurs communautaires expliquent que des erreurs peuvent survenir dans la compilation des listes, surtout en cas de mouvements récents de populations.

📮 Le mécanisme « Malalamiko » : un outil à renforcer
Les partenaires humanitaires ont mis en place un système de gestion des plaintes appelé « Malalamiko », censé permettre aux bénéficiaires de faire remonter des préoccupations en toute confidentialité. Il s’appuie sur des boîtes à suggestions, des comités communautaires et des points d’écoute.
Cependant, plusieurs déplacés disent ignorer l’existence ou le fonctionnement exact de ce mécanisme, ou affirment ne pas avoir reçu de retour après le dépôt de leur plainte.
« J’ai rempli un formulaire mais je ne sais pas si cela a été pris en compte. On ne m’a jamais rappelée », confie un père de famille.
Des représentants de World Vision reconnaissent ces défis et affirment que des réajustements sont prévus pour mieux former les comités locaux et assurer le suivi des plaintes, tout en protégeant les lanceurs d’alerte.
🔄 Perspectives d’amélioration
En collaboration avec les autorités locales et les leaders communautaires, le PAM et ses partenaires humanitaires affirment travailler à :
- Réduire la durée des distributions en améliorant la planification quotidienne.
- Clarifier les critères d’éligibilité pour éviter les malentendus.
- Renforcer la communication locale en swahili et en langues locales.
- Rendre plus accessible et transparent le mécanisme de plainte « Malalamiko ».
🧭 Conclusion
L’intervention humanitaire à Masisi demeure essentielle face à l’ampleur des besoins. Si l’engagement des organisations comme le PAM et World Vision est salué, une attention particulière à l’expérience des bénéficiaires sur le terrain reste nécessaire. Garantir des distributions dans la dignité, l’équité et la transparence est un défi constant — mais essentiel pour préserver la confiance et l’efficacité de la réponse humanitaire.

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